D'après un enseignement du Père Yves-Marie Fradet ( C.S.S.P), recueilli, corrigé et revu par Blaise Mouanga.
Ce charisme suscite souvent des réactions, on le trouve ridicule, absurde, bizzarre, superflu, irrationnel...( 1co 14, 23). Il est considéré comme le "bouc émissaire" pour des gens critiques et embarrassés.
Nous pensons qu'il ne faut pas le majorer en le prenant pour le super-charisme, ni minimiser cette "glossolalie" (prière en langue) souvent chantée. Ce n'est pas une preuve de l'habitation du St Esprit comme certaines personnes le pensent : " si je n'ai pas la charité, je ne suis qu'airain qui résonne ou cymbale qui retentit " ( 1co 13, 1).
Cela explique pourquoi, ceux qui l'exercent ne doivent pas tomber dans le pathologique ( émotionalisme, infantilisme...), ni encore moins dans le miraculeux
( langage mystérieux, infus, tombant du ciel).
La prière-chant en langue est différente du : " parler en langue". Don miraculeux d'une langue étrangère réelle,que l'individu ne connait pas: Miracle de Pentecôte (Ac 2,4,6,8,11). Ce sont des cas rares qui relèvent du miracle, du signe que Dieu veut donner à l'un des assistants (cas d'une prière japonaise, du "je vous salue Marie" en grec, du "Notre Père" en wolof, ou d'une prière mariale "Ma Ima" en araméen).
On note une différence avec le "don de prophétie en langues" qui demande une interprétation (1Co 14,2).
Il s'agit de la glossolalie: prière d'un enfant de Dieu dans la liberté et la spontanéité de l'Esprit, soit dans la prière personnelle, soit dans la prière communautaire de l'assemblée ( 1Co 14, 18), sous forme de parole dite, ou sous forme de chant. Le chant collectif improvisé et souvent d'une rare beauté et d'une intensité religieuse impressionnante pour ceux qui l'écoutent.
La prière en langues "glossolalie" a un solide fondement biblique. Il existe une trentaine d'allusions dans le nouveau testament:
- Jésus l'a annoncé pour ses apôtres dans la finale de l'évangile de Marc ( Mc16; 17)
- Dans les actes des apôtres, c'est le signe distinctif de l'effusion surabondante de la Pentecôte (Ac 2, 4); chez Corneille "ils les entendaient parler en langues et magnifier Dieu" ( Ac 10, 46), Chez les Johannites d'Ephèse (Ac 19, 6) "tout comme nous au début" ( Ac11, 15)
- St Paul en parle abondamment en 1 Co 12, 14: c'est, pour lui, le don le plus modeste de tous, mais il le possède lui-même ( 1Co 14, 18) et il le souhaite aux autres ( 1Co 14, 5).
En Romains 8, Paul précise la double forme de cette prière en langues:
=> v.15: prière filiale dans la liberté et la simplicité de l'Esprit: " Crier Abba, Père"
=> v.26-27: prière de demande et d'intercession qui se traduit par des "gémissements inéffables". Le phénomène est réel et relativement fréquent dans l'Eglise primitive.
- Prière, balbutiement d'enfant qui parle à son "papa" du ciel
- Prenons l'exemple du petit enfant qui ne sait pas parler, mais s'exprime en un gazouillement, un "langage de bébé". Et la maman comprend la signification de ce langage(joie ou inquiétude...).
-" Aussi bien n'avez-vous pas reçu un esprit d'esclaves pour retomber dans la crainte, mais vous avez reçu un esprit de fils adoptifs qui nous fait nous écrier "Abba, Père!" (Rm 8,15). La "prière en langues" est un balbutiement, le langage d'un petit enfant de Dieu ( cf 1 Co 14,2).
- Gémissements ineffables de l'esprit.
Lorsque l'Esprit suscite en nous l'émerveillement devant le Seigneur et ses dons, les mots humains deviennent trop faibles, insuffisants pour exprimer toute l'action de grâces, la louange qui monte de notre cœur. Moment de ravissement de l'enfant de Dieu, souvent lié à la contemplation spirituelle (image intérieure, scène d'évangile...).
Cela est vrai aussi dans la prière d'intercession, de supplication: "L'esprit-Saint vient au secours de notre faiblesse; car nous ne savons que demander pour prier comme il faut; mais l'esprit lui-même intercède pour nous en des gémissements ineffables, et celui qui sonde les cœurs sait quel est le désir de l'Esprit et que son intercession pour les saints correspond aux vues de Dieu" (Rm8, 26-27). Dans le ministère de compassion, la prière, la prière en langues permet de faire monter vers le Seigneur la supplication qui correspond aux besoins du frère ou de la soeur.
Forme de prière non discursive, expression préconceptuelle d'une prière spontanée, - " il dit en esprit des choses mystérieuses... mon esprit est en prière, mon intelligence n'en retire aucun fruit" (1Co 14/2;14)- Un peu comme la jubilation de l'Alleluia. Cela est vécu comme un jaillissement de louange ou de supplication ardente, qui ne peuvent s'exprimer dans les mots et concepts humains.
C'est un don de l'Esprit- plutôt qu'un charisme- surtout utile à celui qui vit.
(a) Libération intérieure
La prière en langues opère un déblocage, une libération intérieure devant Dieu et devant les autres. Si l'on accepte au départ cet acte d'humilité - ce risque de paraître enfantin et ridicule - on éprouve la joie de découvrir un mode de prière avec le coeur, par-delà les mots, au-delà du "cérébral". Cette prière donne paix épanouissement, elle édifie le priant(1 Co 14/4), le fortifie et le console...
(b) Seuil- porte pour d'autres charismes
Le moindre de tous les dons, St Paul, mais il est une voie d'accès aux autres dons, comme une sorte de porte basse: acte d'humilité et d'esprit d'enfance qui débouche sur le royaume de Dieu. Ce don si peu cérébral fait un,e brèche dans notre système de réserve de défense: il fait franchir une sorte de seuil, qui libère et suscite l'abandon au Seigneur. Le cœur se livre à l'emprise de l'Esprit.
(c) Exprimer l'inexprimable
L'esprit lui-même intercède pour nous en des gémissements ineffables (Rm 8/26); on laisse à l'Esprit de Dieu le soin de la glorifier, de lui rendre grâce ou de de le supplier. On laisse jaillir cette prière mystérieuse, inarticulée, du plus profond de notre être: de là un effet de guérison intérieure profonde, guérison des traumatismes cachés qui empêche l'épanouissement de la vie intérieure.
(d) Chemin pour partager, pour se "livrer"
Il est difficile d'exprimer nos sentiments religieux profonds, de se "livrer" en profondeur spirituellement. La prière en langues fait tomber des barrières, des obstacles et donne liberté et simplicité fraternelles pour exprimer ses sentiments religieux. D'où le climat de joie, de fête de de l'assemblée de prière charismatique.